Couvre-feu vidéo ludique appliqué en Corée

En Corée du Sud, le couvre-feu interdisant aux mineurs de jouer la nuit vient d'entrer en application. Le premier bilan est mitigé et les autorités sud-coréennes entendent encore renforcer les mesures de contrôles.

Drapeau sud-coréen

Nous en évoquions les différentes étapes, le parlement sud-coréen a voté l'application d'un « couvre-feu vidéo ludique » interdisant aux mineurs coréens de moins de 16 ans de jouer en ligne entre minuit et 6h du matin. La mesure vient d'entrer en application (le 20 novembre) et déjà un premier bilan en est tiré.

Si la mesure n'a manifestement pas posé de difficultés techniques insurmontables (des tests ont été opérés ces derniers jours), elle continue de susciter des critiques. D'abord quant à son efficacité puisque la mesure peut aisément être contournée : environ 5% des jeunes joueurs continueraient à jouer la nuit en utilisant simplement l'identifiant d'un majeur. Sans doute plus significatif, la mesure ne s'applique qu'aux exploitants (et serveurs) coréens. Dès lors, la presse locale souligne par exemple que lors de la fermeture des serveurs coréens de League of Legends, les joueurs migrent simplement sur les serveurs nord-américains. De même, Battle.Net n'est pas impacté car le réseau de jeux en ligne de Blizzard ne vérifie pas l'âge de ses joueurs.
Ensuite, si la mesure devait initialement ne s'appliquer qu'aux jeux en ligne sur PC, les autorités coréennes l'ont étendue aux réseaux en ligne des consoles de salon (le PSN de Sony et le Xbox Live de Microsoft). Faute de pouvoir appliquer la loi, le PSN en Corée du Sud interdit maintenant l'inscription des mineurs de moins de 16 ans (Sony estime que la mesure n'aura pas d'impact significatif sur ses activités). Microsoft arguait que le système de contrôle parental de sa console permet aux parents de sélectionner eux-mêmes et manuellement les plages horaires de jeu de leurs enfants (plus ou moins sévèrement que la loi). Insuffisant selon les autorités : le Xbox Live dispose d'un délai exceptionnel deux mois pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions.

La mesure prend néanmoins aujourd'hui des allures plus politiques. Pour permettre la meilleure application du texte, les autorités sud-coréennes entendent aujourd'hui renforcer les obligations de contrôle qui incombent aux exploitants de jeux. On sait qu'aujourd'hui, pour se connecter à un portail de jeux en ligne coréen, les joueurs doivent enregistrer leur numéro de sécurité sociale (le fameux KSSN). On sait néanmoins tout autant que des numéros de sécurité sociale valides sont souvent aussi « empruntés » par des mineurs coréens ou des joueurs non coréens (des services illégaux vendent de tels numéros pour quelques dollars).
Pour remédier à ses fraudes (qui s'analysent comme une usurpation d'identité, une infraction pénales), les autorités locales entendent instituer un mécanisme de certification des comptes de jeu, obligeant les joueurs à fournir plus d'informations (numéro de sécurité sociale, mais aussi numéro de téléphone - c'est déjà le cas chez certains opérateurs - ou de carte de crédit, entre autres), aux antipodes des principes de protections des données personnelles.
Aujourd'hui, les associations spécialisées dans la protection des droits fondamentaux en Corée s'inquiètent de cette intrusion dans la vie privée, qu'il considère comme un fichage systématique et une dérive sécuritaire disproportionnée au regard de l'enjeu (jouer la nuit). À ce jour, le gouvernement sud-coréen reste néanmoins sourd à leurs réclamations.

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