Bobby Kotick s'adresse aux salariés d'Activision Blizzard : « nous vous avons entendus haut et fort »

On l’a noté, Activision Blizzard fait l’objet de poursuites devant les tribunaux californiens pour une culture d’entreprise jugée sexiste. Mais au-delà des considérations juridiques, le groupe fait aussi face à une fronde de ses salariés, qui s’estiment trop peu soutenus par leur direction – plus prompte à défendre l’entreprise qu’à entendre les victimes des faits ayant motivé les poursuites. Et la grogne prend de l’ampleur : parallèlement à une marche organisée aujourd’hui devant le campus de Blizzard à Irvine (une demi-journée de congés payés a été octroyée aux participants), les effectifs d’Activision Blizzard ont exprimé ce malaise dans une lettre ouverte, signée maintenant par plus de 2600 salariés du groupe. Le chiffre grimpe régulièrement, au point d’inquiéter les actionnaires – le cours de l’action d’Activision a perdu -8,42% en quelques jours.

La lettre réclame notamment de la compassion et des actions de la part de la direction d'Activision, et Bobby Kotick (le patron d’Activision Blizzard) y répond en esquissant son plan d’action.

Le patron d’Activision reconnait d’abord que les premières réactions des cadres de sa société étaient « restées sourdes » aux préoccupations des employés, et qu’il est « impératif » que le premier cercle du groupe « ait conscience des expériences » des salariées pour mieux « respecter les sentiments de celles et ceux qui ont été maltraités de quelque manière que ce soit ». Et d’indiquer : « je suis désolé que nous n’ayons pas fait preuve de l’empathie et de la compréhension nécessaires ». Il poursuit : 

(...) Vous avez été plusieurs à nous indiquer que votre réaction vient notamment de votre intérêt pour la Compagnie. Le fait que vous soyez si nombreux à avoir partagé des idées, des suggestions, des propositions d’améliorations est un signal puissant de la façon dont vous vous souciez de nos communautés de collègues et de joueurs – et les uns des autres. Ma priorité absolue est de veiller à ce que nous ayons un environnement de travail sûr et accueillant. L'équipe dirigeante vous a entendu haut et fort.
Nous prenons des mesures rapides pour être l'entreprise compatissante pour laquelle vous avez choisi de travailler et pour garantir un environnement de travail sûr. Il n'y a pas de place, où que ce soit dans notre entreprise, pour la discrimination, le harcèlement ou les inégalités de traitement de quelque nature que ce soit. (...)

En conséquence, un cabinet externe a été mandaté pour auditer les procédures et politiques du groupe, imaginer des mesures susceptibles de « promouvoir un lieu de travail respectueux et inclusif », mais aussi pour recueillir des témoignages « en toute confidentialité » et « sans qu’aucune représailles ne soient tolérées ».

Bobby Kotick promet des « changements durables » et annonce d’ores et déjà une série de mesures. En vrac, on en retient : un « soutien aux employés » passant par des enquêtes pour chaque réclamation, qui pourront donner lieu à des « mesures radicales » (le groupe va recruter et y consacrer des moyens supplémentaires) ; des « séances d’écoute » permettant aux salariés de s’exprimer de façon sûre ; des évaluations des cadres visant à identifier ceux qui ont pu faire obstacle aux réclamations des salariées et qui pourra conduire à des « changements de personnel » ; mais aussi une évolution « plus ouverte » des « politiques d’embauche » déjà initiée en début d’année mais qui sera renforcée (pour s’assurer que les directives sont suivies par les responsables du recrutement) et enfin des « changements dans les jeux » puisque « des employés et des joueurs » ont manifestement signalé que « certains contenus en jeu étaient inappropriés : ces contenus seront supprimés ».

On le comprend, au-delà des mesures et politiques internes d’Activision Blizzard, certains cadres du studio pourraient être remplacés et le contenu de certains jeux pourrait aussi évoluer (notamment dans World of Warcraft, où certaines références seront manifestement supprimées – notamment des personnages ou objets in-game faisant référence aux salariés impliqués dans les actes ayant donné lieu à des poursuites). Gageons que des précisions seront communiquées prochainement. Et Bobby Kotick conclut : « Votre bien-être reste ma priorité et je consacrerai toutes les ressources nécessaires pour faire en sorte que notre entreprise ait la culture la plus sûre et accueillante possible. Vous avez mon engagement inébranlable que nous améliorerons notre entreprise ensemble, et que nous serons l'entreprise de divertissement la plus inspirante et la plus inclusive du monde ».