Epic Games et Riot Games contraints de se positionner sur Hong Kong
Le choix de Blizzard de disqualifier un esportif d'Hearthstone pour ses opinions politiques vis-à-vis de Hong Kong contraint d'autres studios à se positionner : Epic entend défendre la liberté d'expression, Riot s'explique devant les joueurs.
Voici quelques jours, Blizzard Taiwan disqualifiait sans ménagement l’un des participants des GrandMasters 2019 d'HearthStone, au motif que le joueur avait profité d’une interview post-match pour apporter son soutien aux manifestations actuellement en cours à Hong Kong, contre les autorités chinoises – la décision du studio s’expliquerait par la volonté de ne pas froisser les autorités chinoises, au risque de perdre l’agrément d’exploitation de ses jeux sur le territoire chinois.
La décision suscite de nombreuses réactions, d’abord chez les joueurs (qui appellent au boycott), mais aussi chez les salariés de Blizzard et jusque dans la classe politique américaine (qui s’indignent). Et aujourd’hui, la note de Blizzard est dégradée chez les analystes financiers, qui redoutent une détérioration de l’image du studio chez les joueurs – à la fois parce que le studio ferait passer ses intérêts financiers avant ses principes, et aussi parce que le studio privilégierait ses intérêts en Asie au détriment de son image en Occident.
Dans ce contexte, la polémique pousse aussi certains autres acteurs de l’industrie du jeu en ligne et de l’esport à se positionner – à commencer par Epic Games (Fortnite) et Riot Games (League of Legends), puisque les deux studios ont pour actionnaire le géant chinois Tencent (propriétaire de Riot Games à 100% et actionnaire d’Epic à hauteur de 40%).
Interrogé sur le sujet, les représentants d’Epic indiquent que vraisemblablement, un joueur ou un créateur de Fortnite qui « exprimerait son point de vue sur la politique ou les droits humains » ne s’exposerait pas à « un bannissement ou une sanction ». Dont acte.
Quant à Riot Games, le studio a été confronté à la question un peu plus frontalement. Les matchs préliminaires des Worlds LoL 2019 se jouaient voici quelques jours et parmi les participants, on retrouve notamment l’équipe des « Hong Kong Attitude », suscitant manifestement un certain embarra chez les commentateurs : l’équipe a d’abord été désignée par son nom complet, avant d’être appelée « HKA » en cours de compétition. Le changement de dénomination a rapidement suscité des interrogations chez les joueurs, d’autant que les interviews sont préenregistrées (et non diffusées en direct), comme si le studio souhaitait s’assurer qu’elles ne donneraient lieu à aucun débordement.
Afin de ne pas être embarqué dans la polémique, Riot s’est très vite expliqué : le studio n’a pas demandé à ses commentateurs d’éviter le terme « Hong Kong » et par principe, il est recommandé d’utiliser le nom complet des équipes. Pour autant, le studio reconnait néanmoins une erreur : ne pas avoir communiqué de directives claires en interne, laissant ses commentateurs dans le flou. Les directives sont néanmoins maintenant connues publiquement. Quant aux interviews enregistrées, le studio le confirme : la plupart des interviews sont effectivement préenregistrées, parfois pour être « attentif au message communiqué » par la marque, parfois pour des raisons pratiques.
Chacun jugera des choix des studios, mais on retiendra néanmoins qu’à l’heure où le jeu en ligne et l’esport s’imposent de plus en plus comme un « spectacle » diffusé à un « public » (pour devenir donc un média), l’industrie du jeu doit manifestement intégrer aussi des considérations géopolitiques à ses stratégies commerciales.
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