Alors qu'il essayait de s'inscrire à la bêta de Paragon, le dénommé Muhammad Zahir Khan a vu son accès bloqué à la bêta du MOBA, du fait de son patronyme. La faute aux filtres (zélés) de l'OFAC, bloquant toutes transactions avec les « ressortissants spécialement identifiés » (ou leurs homonymes) suspectés d'entretenir des liens avec des terroristes ou narcotrafiquants.
On l'a noté, Paragon (le MOBA en 3D d'Epic Games) fait actuellement l'objet de tests et les joueurs curieux sont invités à s'inscrire sur le site officiel pour rejoindre la bêta. Mais encore faut-il le pouvoir : Muhammad Zahir Khan, professeur de communication en Floride, né aux États-Unis, a ainsi vu son inscription à la bêta de Paragon bloquée avec un message d'erreur indiquant que la démarche résulte de son patronyme.
Il s'en émeut dans un tweet adressé à Tim Sweeney (le cofondateur d'Epic Games), et s'interroge sur le caractère islamophobe du blocage. Le tweet est largement relayé (pour autant de messages de soutien que messages à caractère haineux) et après une certaine incompréhension, Tim Sweeney explique la raison du blocage : « désolé, ce [blocage] n'était pas volontaire. Nous travaillons à corriger le problème dès que possible. En cause, un filtre un peu trop zélé lié aux restrictions commerciales des États-Unis ».
Le patronyme de Muhammad Khan est en effet inscrit sur la liste des Specially Designated Nationals (des « ressortissants spécialement identifiés ») tenue par l'Office of Foreign Assets Control, l'OFAC, le bureau américain de contrôle des patrimoines étrangers. En clair : aux États-Unis, l'OFAC dresse des listes de sociétés ou particuliers considérés comme proches des milieux terroristes ou narcotrafiquants dont le patrimoine ou les avoirs sont bloqués par les États-Unis et avec lesquels les sociétés américaines ne sont pas autorisées à entretenir des relations commerciales. Quelque 6000 noms seraient ainsi listés, dont celui de « Muhammad Zahir Khan », non pas le professeur de Floride (un joueur en ligne régulier, qui se dit déjà inscrit sur les plateformes de Blizzard, Origin ou Steam), mais un homonyme pakistanais.
Dans le cas présent, le développeur avait repris dans le formulaire d'inscription de la bêta de Paragon certaines des conditions de ventes de l'Unreal Engine 4, incluant le filtre de l'OFAC et ayant bloqué l'inscription de Muhammad Khan.
Si l'existence de la liste SDN est plutôt méconnue (et parfois des sociétés américaines elles-mêmes qui l'intègrent à leurs dispositifs sans savoir à quoi elle correspond précisément), le cas de Muhammad Khan est « plutôt fréquent », d'après Shirin Sinnar, professeur à la Stanford LAW School dont les propos sont rapportés par NBC, notamment parce que « le champ d'application de la loi est extrêmement large » et que « les sociétés américaines préfèrent faire montre d'un excès de zèle plutôt que d'être accusées de financer, même indirectement, le terrorisme ou les cartels de trafiquants de drogue ».
Finalement, Epic a fait évoluer son système de filtres pour l'inscription à la bêta de Paragon (ne reposant plus uniquement sur le patronyme des inscrits, mais aussi sur leur adresse postale comme les autres plateformes de jeux en ligne). Et si Muhammad Khan se dit « surpris » que le problème n'ait pas été « remarqué plus tôt », il se dit aussi « reconnaissant de l'action de Tim Sweeney et des équipes d'Epic pour avoir corrigé rapidement le problème ». Et de conclure : « nombre de sociétés pourraient s'inspirer de la façon dont Tim Sweeney s'est saisi de la situation. Heureux que nous ayons pu engager le dialogue ». Et chacun devrait donc dorénavant pouvoir s'inscrire à la bêta de Paragon, sans risquer d'y croiser un terroriste ou un narcotrafiquant.
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