La qualité des graphismes est-elle encore un critère de distinction des jeux ?
Longtemps, les développeurs ont tenté de repousser les limites graphiques de leurs jeux. Aujourd'hui, avec le développement technologique, il est plus en plus difficile d'impressionner les joueurs -- il faut donc se démarquer autrement.
Dans l'histoire, la plupart des arts graphiques ont suivi la même évolution : d'abord schématiques, ils se sont faits de plus en plus réalistes jusqu'au dépassement de cette quête du réalisme au profit d'une forme d'abstraction. Plus concrètement et de façon très raccourcie, les arts dits primitifs (symbolistes) ont laissé place à des oeuvres graphiques cherchant à retranscrire de plus en plus fidèlement la réalité au fil des siècles, jusqu'à l'apparition de la photographie (la définition même de la représentation de la réalité) encourageant alors les artistes à « interpréter » plus qu'à « représenter » (via les arts abstraits).
Le jeu vidéo semble suivre sensiblement la même évolution. Les premiers jeux étaient graphiquement très schématiques (les deux barres et le carré de Pong symbolisant une partie de tennis, par exemple) pour gagner progressivement en réalisme au gré du développement technologique. Aujourd'hui, les jeux sont de plus en plus le reflet fidèle de la réalité, au point que certains optent déjà pour des graphismes plus stylisés (des graphismes « cartoon » ou en cell-shading) et que d'autres s'interrogent sur la capacité des graphismes à encore impressionner les joueurs. C'est manifestement le sens de la réflexion de Nicolas Schulz, ingénieur chez Crytek qu'on connait notamment pour être à l'origine du CryEngine et qu'on sait particulièrement attentif à la qualité graphique de ses jeux.
On s'en souvient, en 2007, le studio signait le premier Crysis et à l'époque, le jeu impressionnait par ses graphismes. Le même phénomène serait-il toujours possible aujourd'hui ? La qualité des graphismes est-elle encore un critère suffisant pour qu'un jeu se démarque de ses concurrents ? À l'occasion du lancement de Ryse, le prochain jeu de Crytek, Nicolas Schulz répond à DSOGaming.
Nicolas Schulz : Je pense qu'avec le rendu des matériaux, la qualité des effets de lumières ou des animations faciales, Ryse repousse encore un petit peu le niveau des graphismes en temps réel. Pour autant, d'un point de vue plus global, contrairement à l'époque du premier Crysis, en tant qu'industrie, nous avons atteint aujourd'hui un niveau de qualité tel qu'il est de plus en plus difficile de réellement impressionner les joueurs. Ceci dit, il reste sans doute encore quelques secteurs à explorer et nous continuerons à repousser les limites autant que possible.
On comprend bien le point de vue de l'ingénieur qui prêche pour sa paroisse (et les atouts historiques de son studio). On comprend tout autant que la seule qualité graphique ne suffit sans doute plus à se démarquer : elle reste une exigence, mais tellement généralisée grâce à la démocratisation des moteurs de jeu qu'elle ne suffit plus, à elle seule, à se démarquer de la concurrence. C'est sans doute tant mieux pour les adeptes de gameplay efficace (c'est le critère qui permet de se distinguer), mais peut-être aussi pour les joueurs qui attachent de l'importance aux graphismes puisque la quête de réalisme pourrait laisser place à une plus grande créativité graphique dans les jeux.
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