La vente d'objets virtuels dans les MMOG/MMORPG #16
:: Conclusion
Rédigé par Uther, en janvier 2005
On l'a vu et répété, indépendamment de la théorie juridique, le commerce de personnages, objets et devises virtuels est une réalité, parfois de grande envergure. Des joueurs vendent et achètent plus ou moins ponctuellement des entités numériques pour quelques centaines de dollars, les sociétés spécialisées (comme IGE, par exemple) industrialisent le processus dans des "farming centers" afin d'exploiter un filon à grande échelle.
Face à ce constat, on se demander quel peut être l'avenir de ces pratiques sur un plan économique ou juridique. Certains éditeurs de MMOG/MMORPG se montrent très hostiles au commerce d'objets virtuels et prennent des mesures (plus ou moins efficace) afin de l'entraver. On peut citer Blizzard, par exemple : non seulement, l'éditeur de World of WarCraft impose un contrat de licence et des conditions d'utilisation interdisant ces pratiques (se réservant le droit d'exclure de ses serveurs, les "joueurs" ayant enfreint ces textes), mais en plus inclut dans son jeu, des mesures "liant" chaque objet à un personnage afin de limiter leur vente hors du programme. Même si ces astuces n'entrave pas la commercialisation de comptes entiers (un ou plusieurs personnages, avec leur équipement) ou des devises virtuelles, la démarche est symptomatique d'une volonté de lutte contre le détournement du matériel numérique issu des MMOG.
Gageons (espérons même, pour le juriste, avide de jurisprudences) que dans les mois ou années à venir, les litiges juridiques opposant les éditeurs de MMOG aux vendeurs d'objets virtuels se multiplieront devant les tribunaux et apporteront des réponses claires aux problématiques juridiques encore partiellement en suspend actuellement.
Mais d'autre part et tout en restant très factuel, on peut voir dans cette commercialisation de fait des objets virtuels, une recherche de renouvellement du genre, un nouveau modèle économique appliqué aux univers virtuels et organisé par les éditeurs eux-mêmes. C'est l'exemple du Project Entropia, dont l'originalité est d'encourager l'achat et la vente du contenu du jeu, entre les joueurs (même si ces derniers ne peuvent revendiquer aucune propriété sur les objets virtuels émanant du jeu).
Pour développer encore, Second Life est une simulation virtuelle de société dans laquelle le joueur est le créateur d'objets numériques (sur lesquels il dispose donc de tous les droits d'auteur nécessaire à leur exploitation, même commerciale), qu'il peut introduire dans le programme et commercialiser. Le programme devient une plateforme numérique d'échange d'oeuvres numériques.
En se projetant dans un avenir possible, on peut imaginer bien plus. Des espaces virtuels plus ou moins réalistes permettent déjà de visiter des "lieux réels" (reconstitutions de villes, par exemple, comme c'est déjà le cas pour Grenoble ou de magasins) et d'y faire des achats. L'espace virtuel sert alors d'espace de vente, comme n'importe quel site marchand.
On pourrait aisément imaginer le développement d'espace virtuel similaire, mais proposant des "oeuvres numériques" à la vente, dans un cadre numérique réaliste ou fantastique. Au même titre qu'il est possible d'acheter de la musique (totalement dématérialisée, c'est-à-dire en téléchargeant un fichier musical, exempt de tout support matériel comme un CD), le joueur qui s'acquitte de son abonnement mensuel pourrait se rendre dans un "cinéma virtuel" afin d'y voir le dernier film d'action, également dans les salles analogiques et se rendre dans un café virtuel afin de le commenter en ligne, avec les autres spectateurs ou en publier critique dans un journal accessible en ligne... qui lui aussi pourra être acheté dans un kiosque virtuel et sera totalement dématérialisé.
Au-delà du simple phénomène de "commercialisation d'objets virtuels" dans les MMOG/MMORPG, l'émergence de cette pratique parmi les joueurs aura eu le mérite de démontrer les enjeux commerciaux, mais aussi juridique, qui peuvent naître du développement des nouvelles technologies en général et des espaces virtuels tangibles, comme les MMOG/MMORPG, en particulier.
aka Uther