GC 07 : Abonnement ou micro-transactions ?
Lors de la Games Convention 2007 de Leipzig, John Smedley, CEO de Sony, a tenu à expliquer lors d'une conférence pourquoi il considère que l'avenir du MMO réside dans le « F2P » (ou Free to Play, désignant les MMO disponibles gratuitement ou presque).
Les principaux éditeurs de MORPG étaient présents lors de la Games Convention de Leipzig, en Allemagne, le week-end dernier. La plupart y présentaient leurs dernières productions. Certains en ont profité pour partager leur expérience dans le cadre de conférences.
C'est notamment le cas de John Smedley, CEO de Sony Online Entertainment (SOE), invité à s'exprimer sur le modèle économique des MMORPG. Quel est l'avenir de l'abonnement mensuel ? Quelle est la place des modes de financement à base de micro-transactions (vente d'objets virtuels, zones « à péage »), dans l'industrie du MMO ?
Un peu d'histoire
Les tous premiers MMORPG (Meridian 59, notamment) étaient financés par l'achat de licences ou de boites de jeux, puis facturés en fonction de la durée de jeu (à l'heure, le plus souvent). A la fin des années 90, Ultima Online innove en proposant un modèle économique reposant sur un abonnement mensuel forfaitaire (d'une dizaine de dollars chaque mois), visant à financer les serveurs et l'amélioration régulière du jeu. Ce modèle économique à base d'abonnements deviendra le standard en occident, d'EverQuest (le premier MMORPG de SOE) à World of Warcraft ou la plupart des titres massivement multijoueurs occidentaux.
En Asie dans un premier temps (et pour des raisons principalement sociologiques), les MMORPG délaissent l'abonnement mensuel et privilégient les micro transactions. Les objets les plus puissants ou les plus originaux ne se gagnent pas en jeu, mais s'achètent l'équivalent de quelques euros réels (ou centimes d'euros). De même, certaines zones ou options de jeu ne sont accessibles qu'après paiement d'un péage en argent réel. En guise de test (plus ou moins avoué), SOE s'est essayé à ce modèle économique à base de micro transaction sur certains serveurs d'EverQuest II via sa plateforme Station Exchange. Les essais sont manifestement concluants (1,44 millions de dollars d'échanges y ont été enregistrés en un an), puisque la firme a officiellement retenu ce modèle économique pour plusieurs de ces titres comme Kung Fu Hustle en Asie ou FreeRealms en occident.
Abonnement ou micro-transactions ?
Fort de cette expérience et des choix commerciaux de SOE, lors de la GC de Leipzig, John Smedley a entrepris de trancher entre un modèle économique à base d'abonnements ou de micro-transactions.
A l'entendre, la question ne fait que peu débat. Les micro-transactions apparaissent comme l'avenir financier du MMORPG... et mettant la parole en pratique, John Smedley en a profité pour annoncer que Sony envisageait de distribuer The Agency gratuitement. Ce MMO d'espionnage développé pour PC et PS3, tenant une place de choix dans le catalogue de la firme, devrait être disponible sans abonnement et financé par la vente d'objets virtuels et d'accès à certaines zones spéciales.
Ce choix n'est pour autant pas une évidence. John Smedley affirme avoir parfaitement conscience qu'aujourd'hui, « les joueurs de MMO sont habitués aux abonnements » et longtemps, les financements à base de micro-transactions ont pu rebuter certains d'entre eux. Les usages évoluent néanmoins et Sony « considère aujourd'hui que [les micro-transactions] sont l'avenir du jeu en ligne ». Selon le CEO de Sony, ce modèle économique présente également des avantages non négligeables.
Chute des « barrières à l'entrée »
L'abonnement mensuel fait figure de « barrière à l'entrée ». Si les joueurs se sont habitués à l'abonnement, rares sont ceux à accepter de payer plus d'un ou deux abonnements simultanément. Selon les études, les joueurs de MMO restaient fidèles à leur jeu durant plusieurs mois (un peu moins de deux ans en moyenne), faisant infiniment moins d'infidélités à leur univers de prédilection que les joueurs de titres traditionnels.
A l'heure où le nombre de MMO disponibles augmente considérablement, la concurrence se fait de plus en plus âpre entre les éditeurs de jeux en ligne. Il est manifestement difficile d'attirer les joueurs déjà installés vers de nouveaux MMO et l'absence d'abonnement permet de réduire les réticences. Les essais ont moins de conséquences. On peut plus aisément jouer à plusieurs jeux en ligne gratuits, là où les joueurs se limitaient généralement à un unique titre à abonnement. Ce type de modèles économiques aurait donc la faculté d'aider à la croissance du nombre de joueurs d'un MMO.
Un contrôle du marché
Par ailleurs, un modèle économique à base de micro-transactions coupe l'herbe sous le pied des sites tiers spécialisés dans la commercialisation (illicites) d'objets virtuels. « Il existe un second marché et nous voulons pouvoir y opérer un contrôle, afin que les joueurs ne se fassent pas duper en n'obtenant pas ce qu'ils pensent avoir acheté ». Ce même argument de sécurité accrue pour le joueur motivait déjà la création de la Station Exchange de Sony début 2006. Et la commercialisation d'objets virtuels doit aussi représenter une manne financière qui ne pouvait échapper très longtemps aux éditeurs.
A en croire John Smedley, le choix d'un modèle économique à base de micro-transactions devrait contribuer à la « libre circulation » des joueurs d'un MMO à l'autre. Les joueurs (nombreux) de World of Warcraft devraient ainsi pouvoir se laisser tenter par les titres du catalogue de Sony.
Pour autant, s'il semble plus simple de les attirer, on peut supposer qu'à l'inverse, les fidéliser pourrait s'avérer sensiblement plus compliqué. On peut raisonnablement supposer que le changement de modèle économique, s'il devait se généraliser, s'accompagnera nécessairement aussi d'une évolution du gameplay des jeux, pour devenir plus accessibles (et accrocher plus vite le joueur) et plus communautaires (le principal facteur de fidélité à un titre étant les autres joueurs croisés dans un MMO).
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