Vers la démocratie... ou presque
Vers la démocratie... ou presque
Ainsi, le 9 décembre 1992, après avoir régné en maître absolu sur l'univers de LambdaMOO, Haakon, l'Avatar de Pavel Curtis, prononça un discours par lequel il abdiquait de son rôle de Wizard.
Ainsi, telle est la dernière décision sociale que nous prenons pour vous et qu'en tant qu'adultes indépendants vous le souhaitiez ou non : les Wizards se retirent de toutes formes de gouvernance ; nous remettons ce lourd fardeau et la liberté de ce rôle à la société dans son ensemble.
Les Wizards deviendront des techniciens qui travaillent pour la société.Eux et leurs proches deviendront un simple groupe de résidants au sein de cette communauté, sans autres pouvoirs ou autorité morale que n'importe quel autre intervenant. »
"LambdaMOO Takes a New Direction" (Haakon aka Pavel Curtis), le 9 décembre 1992.
Parallèlement à cette déclaration par laquelle Pavel Curtis se dépossédait de son univers pour le confier à ceux qui le faisait vivre, il y inclut un mécanisme délibératif (qui existe encore aujourd'hui) permettant la prise de décisions par voie électorale faisant de LambdaMOO, une démocratie directe virtuelle. Chaque résidant a la possibilité de proposer des lois (formant la Lambda Law), adoptées ou refusées par l'ensemble des joueurs afin de poser les principes généraux régissant le quotidien de LambdaMOO et de trancher équitablement les litiges opposant les utilisateurs.
Les normes adoptées forment la Lambda Law (littéralement, la loi de Lambda). Comme le développe Jennifer Mnookin dans son essai « Virtual(ly) Law », la Lambda Law résulte des propositions et votes des résidents qui adoptent ou rejettent, à la majorité, les lois qui gouverneront "leur" univers virtuel. Les « résidants » sont dotés d'un véritable pouvoir décisionnel susceptible d'influencer leur avenir virtuel.
Le système normatif de LambdaMOO s'est néanmoins révélé lourd à gérer et peu efficace. D'après Pavel Curtis[12], il générait plus de conflits que les lois ne pouvaient en résoudre. Aujourd'hui, le système démocratique de LambdaMOO n'est plus directement appliquéet les délibérations n'ont plus qu'un rôle purement informatif. L'avatar de Pavel Curtis a retrouvé ses attribues de Wizards.
Sans doute avait-il compris que « le code informatique du monde de LambdaMOO était la loi et la loi du monde de LambdaMOO était le code[13]». Car malgré diverses tentatives mues par une certaine idéologie libertaire, force est de constater que la plupart des univers virtuels restent sous le contrôle exclusif de leurs créateurs.
Gouvernance : quand les joueurs prennent le pouvoir
Même si les développeurs d'univers virtuels sont particulièrement attachés à leur création, les joueurs ne restent pas moins les principaux acteurs de la vie d'un monde numérique. Et à ce titre, que ce soit sous l'impulsion des créateurs eux-mêmes dans le cadre du gameplay d'un MMOG ou après l'avoir conquis (parfois presque par la force), les joueurs peuvent revendiquer un véritable contrôle politique sur le jeu.
Un gameplay politique
La politique imprègne les univers de certains MMOG à des degrés divers. Le MMORPG Anarchy Online, par exemple, appuie sa trame scénaristique sur un fond de lutte de classes futuriste où une élite exploite une classe prolétaire en tout point similaire à celle, réelle, du XIXe siècle. De même, inspiré de la célèbre licence, Star Wars Galaxies repose également sur un affrontement entre l'Empire (tenant de l'ordre) et une faction rebelle... tout comme moult univers virtuels où Ordre et Chaos s'affrontent.
Mais au-delà de ces quelques exemples où une politique purement « cosmétique » habille un monde, quelques MMOG commerciaux intègrent aussi dans leur gameplay une ébauche de systèmes politiques octroyant quelques réels pouvoirs décisionnels aux joueurs.
C'est le cas par exemple d'Atriarch, revendiquant la possibilité pour les joueurs d'influencer l'évolution de l'univers en érigeant leurs propres cités dirigées par un gouvernement susceptible de lever l'impôt (chaque faction peut frapper sa propre monnaie), voter des lois ou dessiner ses routes commerciales. Dans une moindre mesure, par l'intermédiaire de son système de guildes et d'allégeance, le MMORPG Shadowbane intègre aussi un système de gestion politique inspiré de l'Europe médiéval (Shadowbane promet par exemple moult intrigues, complots et assassinats politiques).
Peut-être plus complexe, le gameplay du MMORPG coréen Archlord (distribué en occident par le Britannique Codemasters depuis août 2006) repose sur la conquête du pouvoir politique, économique et militaire en devenant, pour un mois, "Archlord" de l'univers médiéval fantastique de Kantra. Pour parvenir à ses fins, le candidat devra d'abord réunir une série d'artéfacts, symboles du pouvoir de Kantra (nécessitant un imposant groupe de joueurs soudés pour surmonter les épreuves imaginées parles équipes de développement du MMOG), pour ensuite prétendre se faire élire par les autres joueurs comme Archlord. Le gameplay d'Archlord repose sur un double processus électif : dans un premier temps, le candidat devra faire montre d'un charisme et d'un leadership suffisant pour mobiliser sous sa bannière les troupes nécessaires à la conquête et la défense des artéfacts de Kantra. Et dans un second temps, il devra réussir à s'imposer et se faire élire parmi l'ensemble des conquérant et prouver à ses pairs qu'il mérite le statut suprême. Au-delà de l'expérience et des compétences du joueur, le prétendant devra démontrer des qualités humaines aptes à convaincre le groupe.
Mais sans doute moins démocratique, certains groupes de joueurs détournent aussi parfois le gameplay politique des jeux à des fins moins altruistes. Blizzard, le développeur de World of Warcraft, a par exemple intégré un mécanisme de conquête de territoires dans son jeu. Une minorité de joueurs parmi les plus puissants doit entrer dans la légende en surmontant une série de missions épiques dont le résultat sera l'ouverture, pour la totalité des joueurs du serveur, d'un portail magique menant à de nouvelles régions à explorer. En février 2006, la guilde « Imperial Order » a relevé le défi et réussi les missions permettant d'ouvrir le portail du serveur Detheroc de World of WarCraft. Mais très pragmatiques, certains membres de la guilde ne se sont pas contenté de la gloire de l'exploit et ont exigé auprès de la population du serveur, le paiement d'un impôt (d'une rançon ?) de 5000 pièces d'or pour activer le portail magique. A défaut, le portail resterait fermé pour tous.
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