Pour la première fois, NCsoft enregistre un déficit annuel mais se prépare à l'ère « post-Lineage »

Cette semaine, NCsoft publiait ses résultats du quatrième trimestre 2024 et donc de son exercice fiscal de l'année. Et comme la rumeur le laissait entendre, les chiffres ne sont pas bons : pour la première fois de son histoire, le géant coréen enregistre des pertes sur l’ensemble d’un exercice annuel.

Le (contre)coût d’une année de restructurations

Concrètement, NCsoft annonce un chiffre d’affaires trimestriel (quatrième trimestre 2024) de 409 milliards de wons (270 millions d’euros), en baisse de 6% en un an, pour une perte d’exploitation de 129,5 milliards de wons (85,5 millions d’euros) et un déficit net de 7,6 milliards (5 millions d’euros). Sur l’ensemble de l’année 2024, sur un chiffre d’affaires annuel de 1578 milliards de wons (de l’ordre d’un milliard d’euros), le groupe accuse une perte d’exploitation de 109 milliards de wons (72 millions d’euros). Et c'est donc une première dans l'histoire de NCsoft. 

Si les chiffres font grise mine, ils reflètent « l’année de restructuration » de NCsoft : la scission de ses activités en plusieurs studios distincts et surtout le coût des licenciements d’une partie significative de ses effectifs (NCsoft comptait plus de 5000 salariés fin 2023 contre 3100 en 2024, après plus de 900 départs volontaires ayant donné lieu à des indemnités). Selon le groupe, ses finances sont dorénavant assainies, ses caisses ont vocation à être renflouées via la vente d’une partie de ses locaux et pour rassurer ses actionnaires, NCsoft va procéder non seulement à la distribution de dividendes exceptionnels mais aussi à la destruction de quelque 400 000 de ses actions afin de doper son cours de bourse. Voilà pour rasséréner les actionnaires. 

Des jeux PC attractifs en Occident

Au-delà des résultats chiffrés et des actionnaires, quid de la santé économique de ses jeux ? La baisse de chiffre d’affaires de NCsoft s’explique principalement par l’essoufflement de ses jeux mobiles – qui accusent une baisse de chiffre d’affaires de 15% en un trimestre.

À contrario, les jeux PC de NCsoft connaissent un regain d’activité (+16%), notamment en Occident. Guild Wars 2 a enregistré une croissance de 30% grâce à la sortie de l'extension Janthir Wilds. Le chiffre d’affaires de Blade and Soul a quadruplé au quatrième trimestre avec le lancement de la version NEO du MMO d'arts martiaux. 

On le sait, le quatrième trimestre 2024 était aussi marqué par le lancement occidental de Throne and Liberty par Amazon Games – selon l'exploitant occidental, le jeu a attiré sept millions de curieux. NCsoft ne publie pas le détail financier de l’exploitation du MMORPG dans ses comptes, mais on y trouve néanmoins le montant des royalties touchés par le groupe coréen : 48,5 millions d’euros au quatrième trimestre (contre de l’ordre de 20 millions un an auparavant).

Si le montant ne permet que d’imaginer des estimations du chiffre d’affaires total de Throne and Liberty en Occident, ce montant « confirme », selon les cadres de NCsoft, « qu’il y a une toujours demande pour de nouvelles formes de MMORPG sur le marché mondial ». Un constat qui incite donc NCsoft à « renforcer encore (se)s capacités d'édition en ciblant les marchés nord-américain et européen », et à « envisager d'étendre (sa) présence au Moyen-Orient et en Asie du Sud » (pour mémoire, le Fond souverain d’Arabie Saoudite a investi dans le capital de NCsoft).

Préparer « l’après Lineage » avec de nouvelles licences et de nouveaux genres

Avec quels jeux NCsoft pourrait-il conquérir l’Occident ? Après avoir prospéré pendant 25 ans sur la licence Lineage (le jeu de base, puis ses suites et moult déclinaisons), le développeur considère que l’année 2025 devra marquer le lancement d’une « ère post-Lineage », reposant sur d’autres licences, incluant des franchises inédites, et des jeux de genres différents (des jeux PvE, PvP, des MMORPG mais aussi des RPG d’action).

Dans ce contexte, NCsoft livre son planning de prochaines sorties, dont l’un des points d’orgue sera Aion 2. À partir du deuxième trimestre, NCsoft commencera à communiquer activement pour dévoiler les « composantes clefs du jeu ». Et selon le studio, elles sont aussi originales et novatrices sur le marché actuel qu’étaient celles du premier Aion ou de Blade and Soul à leur sortie respective – et qui, à l’époque, ont contribué à une croissance globale du marché du jeu en ligne. On commencera donc à découvrir ces originalités dans les semaines à venir. La sortie du jeu est annoncée pour cette année en Corée du Sud et à Taiwan... mais prendra davantage de temps en Occident. Selon NCsoft, T&L a confirmé que les joueurs occidentaux ont des attentes différentes de celles des joueurs asiatiques, et le studio entend donc prendre le temps d’adapter Aion 2 en conséquence avant un lancement mondial.

À plus court terme, le studio mentionne son jeu de stratégie Tactan: Knights of the Gods, actuellement en cours de finalisation et dont la sortie (coréenne ?) est prévue pour « le premier ou le deuxième trimestre 2025 ». Le Project LLL qui repose sur des mécaniques de shooter MMO est aussi attendu au second semestre de cette année, avec d’abord des focus group tests, à partir du deuxième trimestre 2025, puis une bêta – dorénavant, le studio entend miser sur le retour des testeurs pour promouvoir ses prochains jeux, plutôt que sur une présence marketing dans les salons. Plusieurs titres sont ensuite attendus jusque fin 2026, incluant des jeux conçus en interne, des jeux reposant sur des licences reconnues (on pense au MMO basé sur la licence Horizon de Sony, qui ne serait pas abandonné, contrairement aux rumeurs ayant circulé un temps) ou encore des jeux de développeurs tiers édités par NCsoft. Le studio entend aussi commercialiser ses IA, manifestement exploitables dans de nombreux domaines différents. 

On le comprend, NCsoft traverse actuellement une période charnière : le groupe connait manifestement une mauvaise passe, va devoir regagner la confiance des joueurs et des investisseurs, le tout dans un contexte de restructuration mal acceptée par ses salariés. Pour autant, le groupe a aussi des projets. Et s'ils se concrétisent, NCsoft pourrait peut-être finalement trouver le second souffle recherché depuis maintenant plusieurs trimestres.